Le mois de Marie
ou méditations sur sa vie, ses gloires et sa protection
Source : Livre "Le mois de Marie ou méditations pour chaque jour du mois sur sa vie, ses gloires et sa protection" par Aleksander Jełowicki
DU CŒUR IMMACULÉ DE MARIE.
La fête du Cœur immaculé de Marie tombe le premier dimanche après l'octave de l'Assomption.
0
Marie ! que dirai-je de votre cœur ? C'est le cœur le plus douloureux,
le plus aimant, le plus beau. Le plus douloureux, car il souffre de
toutes les douleurs de Jésus ; le plus aimant, car il aime de l'amour de
Jésus ; le plus beau, car il ressemble le plus au cœur de Jésus. Il est
doux, humble, pur, patient, clément, miséricordieux, docile, obéissant
jusqu'à la mort.... jusqu'à la mort de la croix, qui était plus que la
vôtre, car c'était la mort de votre fils.
0
Marie ! votre cœur est le plus beau ! En le contemplant, Dieu vous a
dit : « Vous êtes toute belle, ma bien-aimée ('). » 0 Marie ! votre cœur
est le plus aimant ! aimant Dieu d'un amour si grand que Dieu lui-même
vous a dit : « Vous avez blessé mon cœur ('). » 0 cœur de Marie ! cœur
selon le cœur de Jésus-Christ ! riche de toutes les vertus, faites-vous
connaître à nous, et faites que nos cœurs se forment à votre exemple.
0
Marie ! quel est donc ce glaive qui traverse votre cœur ? Ah ! c'est le
glaive à deux tranchants qui a percé votre âme et qui s'est fixé dans
votre cœur. Le cœur de Marie est toujours saignant, toujours douloureux,
et cependant il est calme et toujours calme, car il est toujours soumis
à la volonté de Dieu. 0 Marie ! apprenez-nous cette vertu, car c'est
elle qui, au milieu d'afflictions et de souffrances, donne la paix et la
joie du cœur !
Dieu
perce les cœurs par la douleur pour y entrer par l'amour. Celui qui
comprend cette miséricorde de Dieu l'en bénira ; car si Dieu a percé le
cœur si pur, si saint de Marie, d'un glaive si cruel, pour y faire
germer un amour sans bornes, qu'y a-t-il d'étonnant que nos cœurs,
couverts, enveloppés de péchés sans nombre, soient brisés d'afflictions
et de douleurs, afin que l'amour de Dieu y puisse pénétrer ? Et puis, si
l'innocente et la sainte Marie non seulement ne se plaint pas de ses
douleurs, mais si au contraire elle les bénit, que faisons-nous donc,
nous pécheurs, en nous plaignant de nos souffrances, en cherchant à nous
en soulager autrement qu'en recourant à Dieu ?
Rien
ne dissipe les ténèbres de la nuit que le soleil ; rien ne dissipe nos
afflictions que Jésus ; et cette aurore sans laquelle le soleil ne se
lève jamais : Marie ! Dans toutes nos tribulations, implorons Marie, car
Jésus la suit toujours. Saint Philippe de Néri assure qu'il dissipait
tous ses chagrins, calmait toutes ses douleurs en invoquant Marie. Un
enfant qui souffre se presse sur le sein de sa mère, et bientôt il
oublie sa douleur, et sa dernière larme semble une goutte de rosée se
jouant sur la fleur. Et nous aussi, enfants de Marie, pressons-nous sur
son sein ; sa douce haleine séchera nos larmes, et n'en laissera qu'une
goutte dans le souvenir de douleurs passées, pour augmenter le charme de
nos cœurs, pour ajouter du prix à notre joie, pour raviver notre amour ;
car le cœur le plus souffrant aime le plus ardemment.
Le
symbole de l'amour divin, c'est la croix ; le symbole de l'amour de
Marie, c'est le glaive. Ainsi nous ne pouvons avoir pour symbole de
notre amour que la croix et le glaive. Soyons donc prêts à endurer
toutes les souffrances, parce que Jésus et Marie ont souffert pour nous ;
parce que nous avons péché ; parce qu'il nous faut mériter la
miséricorde divine ; parce qu'il faut que nous nous donnions entièrement
à Dieu ; parce qu'il faut que nous nous arrachions complétement au
monde et à nous-mêmes ; parce qu'enfin nous devons, pendant notre séjour
terrestre, travailler à nous assurer de notre séjour céleste.
Les
souffrances imméritées sont les dons les plus favorables de Dieu ; il
ne les accorde qu'à ses élus comme preuve de son amour particulier,
comme signe de la gloire spéciale qu'il leur a préparée au ciel. Jésus a
souffert, et il est ainsi entré dans sa gloire ; nous aussi, nous
devons souffrir pour la partager avec lui. Celui qui souffre le plus de
souffrances imméritées acquiert le plus de ressemblance avec
Jésus-Christ, et participera le plus à sa gloire. Marie fut la créature
la plus aimée de Dieu, aussi l'a-t-il éprouvée le plus. La plus grande
part de gloire avait été destinée pour Marie, aussi Dieu a-t-il percé
son cœur des douleurs les plus poignantes. 0 Seigneur ! comptez-nous
aussi parmi vos élus, aimez-nous aussi, et percez aussi nos cœurs de
douleur, pour les remplir de votre saint amour. « Mon cœur est préparé, ô
Dieu ! mon cœur est préparé ('). »
0 Jésus ! ô Marie ! vous avez souffert par amour pour nous ; faites-nous souffrir par amour pour vous.
II
Quelle
est donc la couronne qui entoure votre cœur, ô Marie ? C'est la
couronne de roses blanches, symbole de sa pureté sans tache qui répand
autour d'elle un charme inexprimable, exhalant un parfum de toutes les
vertus. Toutes les vertus ont établi leur siége dans le cœur de Marie,
dans ce trône de la sagesse divine ; toutes ont déposé leurs trésors
dans le cœur de Marie, dans ce sanctuaire brillant de l'or de la vérité (
domus aurea). Le cœur de Marie est le vase spirituel rempli de la grâce
divine : vase d'honneur, plein de la majesté de Dieu ; vase insigne de
la dévotion, plein de cet admirable amour de Dieu, qui veille toujours
et qui prie toujours ! « Je dors, et mon cœur veille ; la voix de mon
bien-aimé qui frappe. Ouvrez-moi, ma sœur, ma bien-aimée, ma colombe,
vous qui êtes sans tache (') ! »
Le
cœur de Marie veille toujours, parce qu'il aime toujours ; car le cœur
aimant veille constamment, attentif à la voix du bien-aimé qui frappe et
dit : « Ouvrez-moi ! » C'est à cause de l'amour si vigilant de Marie
que Dieu l'appelle si tendrement, si amoureusement : « Ouvrez-moi, ma
sœur, ma bien-aimée, ma colombe, vous qui êtes sans tache ! »
Que
Dieu aimât le cœur de Marie, le cœur si pur, si saint, si fidèle, cela
se conçoit ; mais que l'amour de Dieu cherche constamment à pénétrer
dans nos détestables cœurs, pour les purifier de tous les vices, pour y
semer toutes les vertus, pour y établir son trône divin, voilà ce qui ne
saurait se concevoir. Et, s'il y a quelque chose de plus étonnant,
c'est notre insolente indifférence à la voix de Jésus-Christ, qui nous
appelle constamment, et en frappant à nos cœurs, nous dit en vain : «
Ouvrez-moi ! » Nous vivons, mais nos cœurs sont morts ; nous veillons,
mais nos cœurs dorment ; ils n'ont pas le sentiment qu'ils devraient
avoir ; ils ne prient pas comme ils devraient prier, et voici pourquoi
ils se livrent au péché.
«
Veillez et priez, afin que vous ne tombiez point dans la tentation (').
« Veillez donc, puisque vous ne savez quand le maître de la maison doit
venir, si ce sera le soir ou à minuit, ou au chant du coq, ou au matin ;
de peur que, survenant tout d'un coup, il ne vous trouve endormis (2).
Or ce que je vous dis, je le dis à tous : Veillez ! » « Me voici à la
porte, et j'y frappe. Si quelqu'un entend ma voix et m'ouvre la porte,
j'entrerai chez lui, et je souperai avec lui, et lui avec moi (3). » «
Heureux ce serviteur si son maître, à son arrivée, le trouve agissant de
la sorte (4)! » « Si vous entendez aujourd'hui sa voix, gardez-vous
bien d'endurcir vos cœurs (5)! »
Ah
! Marie ! malgré ces avertissements, que de fois, insensible à la voix
de votre fils, je l'ai entendu sans l'écouter. Ah ! Marie, dites à Jésus
qu'il vienne encore une fois ; cette fois il ne frappera pas en vain,
car j'ai toute confiance que vous serez dans mon cœur pour le lui
ouvrir.
O
Marie ! quelle est donc la flamme qui brûle et qui brille dans votre
cœur ? Sa lumière est plus douce que celle de la lune, plus éclatante
que celle du soleil ! C'est le feu de la charité dans lequel brûle et se
consume éternellement le sacrifice permanent et complet sans cesse
offert à Dieu : c'est le feu mystérieux qui fait fondre ensemble votre
cœur et celui de Jésus. Cette union de votre cœur avec celui de Jésus,
cette conformité de votre volonté avec celle du Père éternel, vous
rendent plus encore d'esprit que de corps la mère de Jésus, selon ces
paroles du Christ : « Quiconque fait la volonté de Dieu, celui-là est
mon frère, ma sœur et ma mère ('). » - En suivant l'exemple de Marie,
c'est-à-dire en faisant la volonté de Dieu par amour pour Dieu, rien
n'est plus facile que de devenir frère ou sœur de Jésus-Christ. Cœurs
humains, vous cherchez l'amour, vous avez besoin d'amour ; vous ne
pouvez être sans amour : il est pour votre âme ce que l'air est pour
votre corps ; il est le feu qui entretient votre vie. Où le
cherchez-vous donc ? puisque l'amour infini, puisque Dieu lui-même se
donne à vous, pour que vous l'aimiez ! puisque pour mère il vous a donné
la mère de son Fils ! afin qu'elle vous élève pour être (ils de Dieu,
en allumant dans vos cœurs ce feu qui brûlait dans le sien, ce feu du
ciel que Notre-Seigneur jeta sur la terre, comme il le déclare lui-même :
« Je suis venu, dit-il, pour jeter le feu dans la terre ; et que
désiré-je, sinon qu'il s'allume (') ? » ce feuj qui ne consume pas,
maisqui vivifie ; ce feu d'amour, enfin, qui brûle avec tant de force
pour Dieu et pour nous dans le cœur de Marie !
0
Marie ! ô ma mère ! vous avez blessé mon cœur, et moi j'ai blessé le
vôtre ; mais quelle différence ! Vous avez blessé le mien avec un trait
d'amour ; j'ai blessé le vôtre avec un glaive de douleur !
O
Mère adorable ! adorable surtout parce que vous m'aimez, bien que je
sois l'un des assassins de votre fils ! adorable, parce que vous m'aimez
comme si j'étais votre fils unique, comme si j'étais votre unique
bonheur. Vous me cherchez, vous me suivez partout de votre amour, bien
que je me cache de vous, bien que, comme un insensé, je vous fuie
toujours !
Que
je sois dans les déserts, que je sois au fond des précipices, votre
cœur maternel est toujours près de moi pour me consoler dans mes
afflictions, pour me guider quand je m'égare, pour m'assister quand je
succombe, pour me calmer dans mes agitations, pour m'avertir quand je me
perds, et me ramener dans la maison paternelle ; pour rafraîchir ma
lassitude, pour nourrir ma faim, pour abreuver ma soif avec le corps et
le sang de Notre-Seigneur, pour couvrir ma nudité avec la grâce de Dieu.
0
Marie ! non seulement vous vous donnez à moi, mais encore vous me
suppliez que je vous accepte avec toute la richesse, tout le charme et
toute la puissance de la grâce divine que vous m'apportez.
0
Marie ! la multitude même de mes péchés, qui ont grossi comme les eaux
d'un fleuve, n'a pas pu éteindre votre charité pour moi ; car « les
grandes eaux n'ont pu éteindre la charité, et les fleuves n'auront pas
la force de l'étouffer ('). »
0
mère du Rédempteur ! mère de ceux qu'il a rachetés ! retirez-moi tout
ce que je possède, et donnez-moi votre cœur, c'est-à-dire l'amour de
Dieu et du prochain. Alors encore, le trésor que vous m'aurez donné me
serait donné pour rien ; car «quand un homme aurait donné toutes les
richesses de sa maison pour la charité, il les mépriserait comme s'il
n'avait rien donné (2), » puisque toutes les richesses et le monde
entier ne sont rien en comparaison de la charité.
Aucun commentaire :
Enregistrer un commentaire