Le mois de saint Joseph
10 mars
Source : Livre "Mois de Saint Joseph : composé de trois neuvaines et un triduum pour tous les jours du mois de mars" par Alexis Lefebvre
DEUXIÈME NEUVAINE
OU
NEUVAINE DES VERTUS
FOI. - ESPÉRANCE. - CHARITÉ PRUDENCE. - JUSTICE. — FORCE. - TEMPÉRANCE HUMILITÉ. - PURETÉ
DIXIÈME JOUR
LA FOI
Mon juste vit de la foi.
(Hebr. X. 58.)
Toute la seconde Neuvaine de ce mois béni de saint Joseph sera consacrée à l'étude de ses principales vertus.
Nous
les contemplerons dans son cœur, et nous nous efforcerons de les
imiter, puisque c'est la meilleure manière de lui prouver notre amour,
et d'attirer sur nous les effets de sa puissante protection.
Joseph
a possédé le trésor de toutes les vertus : en conséquence même de son
élection divine et de ses relations incessantes avec Jésus et Marie, il a
été prévenu, comblé de toutes les grâces du ciel, et, par sa fidèle
correspondance à tant de faveurs, il a dû s'élever à la plus haute
perfection.
Nous
suivrons l'ordre le plus simple et le plus naturel dans ces pieux
exercices : trois jours seront consacrés aux vertus théologales, quatre
aux vertus cardinales, et les deux derniers aux deux belles vertus
d'humilité et de pureté, que nous appellerons fondamentales ou
essentielles.
Commençons par la foi.
Elle est en effet la base et le principe de toute sainteté ; sans elle
on ne peut pas même espérer de plaire au Seigneur : Sine fide
impossibile est placere Deo (Hebr. xi, 6).
Or toute la vie de saint Joseph a été un acte sublime de foi.
Le juste de Dieu vit de la foi : Justus...meus ex fide vivit ; ne
devons-nous pas en conclure que Joseph, le juste de Dieu par excellence,
dut toujours vivre de cette vertu ?...
Ouvrez
l'Évangile : Joseph autem vir ejus, cum esset justus (Matth. I, 19),
comme Joseph, époux de Marie, était juste..., c'est pour cela qu'il a
été choisi et mis à la tête de la Sainte Famille, parce qu'il était
juste, et par conséquent animé de la vie de la foi.
Ce
qu'il y a de plus admirable dans la foi de Joseph, c'est qu'elle n'a
jamais cessé de croître dans son cœur, malgré le danger même de sa
position ; car les âmes s'habituent facilement aux choses les plus
saintes et les plus divines. La familiarité diminue ordinairement le
respect : mais la foi de Joseph grandissait de jour en jour auprès de
Jésus, ce Dieu anéanti, et qui lui obéissait en toutes choses. Aussi
bien est-ce pour cela, comme nous le dirons plus tard, qu'on l'invoque
souvent, et que les prêtres surtout ont recours à lui, afin d'obtenir
l'esprit intérieur et la vie spirituelle de la foi.
Tous
les exercices de cette neuvaine seront partagés en deux points. I. Une
question dogmatique, où l'exposé simple de la doctrine sur la vertu que
nous devons étudier. II. Une question pratique, c'est-à-dire un examen
et une leçon pour apprendre et acquérir cette vertu.
I.
La foi est un don du ciel, une lumière, une touche secrète, un
mouvement de l'Esprit Saint, qui nous porte à croire tout ce que Dieu a
dit et révélé à son Église. C'est une vertu céleste, et on l'appelle
théologale parce qu'elle unit l'âme fidèle à Dieu, comme les deux
autres, l'espérance et l'amour.
Pour
bien concevoir la nature de cette vertu, vous n'avez qu'à méditer
attentivement votre acte de foi : Mon Dieu, je crois fermement, etc.
Vous
remarquerez aussitôt l'objet de votre croyance, c'est tout ce que Dieu a
dit ; et le motif ou la raison de votre foi, c'est la vérité même et
l'autorité de ce grand Dieu.
Vous
comprenez immédiatement la nécessité de cet acte religieux, et pourquoi
l'Apôtre a dit que c'était le premier pas à faire pour aller au
Seigneur : Credere oportet accedentem ad Deum (Hebr. xi, 6).
Comment
en effet un homme pourrait-il s'entretenir, s'entendre avec son Dieu,
s'il était assez téméraire pour refuser de le croire, assez orgueilleux
pour rejeter sa parole sainte ?
Mais,
si au contraire l'âme, éclairée des splendeurs de la vérité éternelle,
adore en silence, et croit fermement et avec amour, ce Dieu la remplit
des plus ineffables consolations et s'unit à elle dans l'acte sublime de
la foi : Sponsabo te mihi in fide (Osée, H, 20), dit-il, par un
prophète.
Nous
ferons sur cet acte religieux deux remarques bien importantes ; et
d'abord, prouvons qu'il ne peut rien y avoir de plus glorieux à Dieu que
la foi.
C'est le sacrifice, l'holocauste parfait de l'homme tout entier.
Par
la soumission à une parole nécessairement pleine de mystères, nous
immolons à Dieu notre intelligence, et par la soumission à une parole
toujours pleine de devoirs, nous immolons à Dieu notre cœur ; c'est donc
mourir pour lui, mourir à nous-mêmes que vivre de la foi et de l'esprit
de cette foi.
Mais
aussi, voyez comme dans tous ces mystères et dans ces sacrifices
commandés par la foi, voyez comme l'amour vient aider à l'intelligence
et au cœur de l'homme, jusqu'à lui rendre la parole de Dieu trop facile à
croire, et le joug même de ses lois trop suave et trop léger :
testimonia tua credibilia facta sunt tùmis (Ps. Xcii, 5).
Il
nous sera extrêmement doux de méditer un instant cette pensée féconde,
en parcourant les plus grandes vérités de la révélation : l'incarnation,
la rédemption, l'eucharistie... Quels mystères ! est-il possible ?...
Pouvez-vous y comprendre un mot ? pouvez-vous croire cela. Mais on vous
dit que c'est par amour pour vous que ce Dieu est né dans une étable
!... par amour qu'il a voulu mourir sur une croix ! par amour qu'il veut
se donner à votre âme !... Ah! vous commencez à comprendre, et bientôt
vous- le croirez sans peine. L'amour explique tout, et vient en aide à
la foi ; il n'y a plus de mystères pour votre cœur. 0 mon Dieu, votre
parole devient trop facile à croire : Testimonia tua credibilia facta
sunt nimis.
De
ces notions saintes et de toute cette doctrine sur le principe et les
motifs de la foi divine vous pouvez encore tirer des conséquences déjà
très-utiles pour la pratique, vous voyez quelles qualités doit avoir
cette vertu religieuse. Il faut qu'elle soit humble et constante, active
et généreuse.
—
Constante d'abord, car ce grand Dieu qui a parlé, ne changera pas : ego
Dominus et non mutor (Malach. m, 6) ; et sa parole sainte est comme son
trône, immuable et éternelle : verbum Domini manet in seternum. (I
Petr. H, 25).
—
Active et généreuse ; car si l'esprit même de la foi, si cette vie
n'animait pas vos pensées, vos sentiments et vos œuvres, votre foi
serait vaine et stérile : vana est fides vestra (I Cor., xv, 17). Que
dis-je ? elle serait morte : et fides sine operibus mortua est (Jac, il,
26), et votre condition deviendrait plus triste que celle des païens :
et est infuleli deterior (I Tim., v, 8), car ils n'ont pas vu la
lumière, ces malheureux, ils n'ont pas connu la vérité ; et vous, après
l'avoir vue, vous auriez fermé les yeux, et résisté à l'Esprit-Saint.
II. Nous n'avons plus qu'à examiner si nous avons la vie de la foi, qui est le commencement de la justice devant Dieu.
C'est
elle, avons-nous dit, c'est son esprit qui devrait animer nos pensées,
inspirer les sentiments de notre cœur, diriger nos paroles et régler nos
actions.
Voyez
donc si vous êtes riche de cette vie supérieure et divine : divites in
Jide (Jac, n, v) ; si vous aimez et cherchez les choses d'en haut, les
choses du ciel et de Dieu ; si surtout, avec cette arme de la foi, qui
seule peut vaincre le monde, vous savez combattre et résister !
N'est-ce
pas plutôt le monde avec son esprit d'orgueil et de volupté qui est
entré dans votre âme, et qui devient comme la régle de votre vie,
dominant tout, la pensée, le sentiment, et donnant l'impulsion et le
mouvement à votre cœur ? De quoi parlez-vous ? et quel est le fond de
vos désirs, de vos espérances ? quelle est la fin, le but premier de
toutes vos entreprises, de vos actions les plus ordinaires ? 0 mon Dieu !
si vous descendiez aujourd'hui sur la terre, et si vous veniez chercher
la foi dans les plus belles cités du monde, que vous en trouveriez peu
!.». Et qu'ils sont rares, les vrais chrétiens, ceux qui croient
fermement à ce que vous avez dit et révélé !
Oui,
je l'affirme, il y en a peu qui croient même aux vérités purement
spéculatives aux mystères de la révélation, à la sainte Trinité à la
rédemption, à la divine eucharistie... Car, si on y croyait, on
aimerait, on adorerait, et dans les églises où ce Dieu habite, on aurait
plus de respect, on ne serait pas si indifférent ; on viendrait
demander et manger le pain de la vie éternelle... Oh ! que nous croyons
donc peu, même à ces grands mystères !
Mais
on croit encore moins aux saintes et fondamentales vérités du symbole :
à la mort, au jugement, à l'enfer, à l'éternité ; car on vit à peu près
comme si on n'y croyait pas du tout.
Vous-même,
mon cher lecteur, avouez que vous n'auriez pas beaucoup à changer à
votre vie, si vous pensiez ne pas devoir mourir, et s'il n'y avait ni
ciel, ni enfer, ni éternité pour vous ! avouez que, sous ce rapport, la
foi pour vous est vaine et stérile ; qu'elle est bien près de mourir, si
elle n'est pas morte ; en un mot, qu'elle est sans influence, sans
action, sans force, et que vous êtes parfaitement indifférent à ces
choses de l'autre monde.
Puis,
il y a encore d'autres paroles évangéliques essentiellement pratiques
aussi, des vérités saintes qui, bien comprises et gardées dans un cœur
docile, ne manqueraient pas de nous désillusionner des vanités de la
terre et de nous conduire bientôt à la perfection même et à la sainteté ;
mais qu'ils sont rares les chrétiens qui croient encore à ces divins
oracles !
Par
exemple, vx mundo, vs e divitibas!... malheur au monde, malheur aux
riches ! Et on aime le monde, on ne travaille que pour devenir riche, et
rendre ainsi son salut plus difficile... Quserite primum regnum Dei...
Beati pauperes !...
Cherchez
avant tout le royaume de Dieu... Heureux les pauvres ! Qui donc croit
encore ces choses ? et surtout, qui pense à se conduire dans la vie,
d'après ces principes de la foi ?
Mais
vous, mon cher lecteur, examinez donc où vous en êtes ; descendez
sérieusement au fond de votre cœur, et vous constaterez d'abord le fait :
vous avez bien perdu, vous n'avez plus autant de foi ; puis, quand
-vous l'aurez reconnu, cherchez la cause de la diminution de ces vérités
éternelles dans votre âme : diminutx sunt veritates a filiis hominum
(Ps. xi, 2).
Si
vous ne pouvez pas trouver le principe du mal ; je vous le dirai, moi,
avec saint Jean Chrysoslome, et soyez sûr que ce grand docteur n'a pu se
tromper : c'est que votre cœur a perdu son innocence et sa pureté.
Voilà
la raison, la cause de toute incrédulité : Impossibile est, si vitam
impuram habeas, in fide non vacillare : Il est impossible de ne pas être
ébranlé dans la foi, si l'on se laisse aller aux vices impurs.
Des
nuages s'élèvent des cœurs corrompus, et bientôt ils obscurcissent ia
lumière céleste des intelligences, et c'est toujours dans la boue que
s'éteint le flambeau de la foi. Dites-moi si vous avez vu jamais le lis
de l'innocence dans la main d'un incrédule ? Non, jamais ! !...
Vous
terminerez cet exercice par un colloque fervent avec saint Joseph, pour
lui demander la grâce de la foi. Priez-le de rallumer ce divin flambeau
dans votre âme : adjuva incredulitatem meam... (Marc, ix, 23). 0
Joseph, venez en aide à la faiblesse de ma croyance. Adauge nobis fidem
(Luc, xvn, 5) : Augmentez la foi dans mon cœur.
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